Malgrado il cessate il fuoco, i russi contano di rimanere in Georgia
● L’accordo sul cessate il fuoco in Georgia – proposto dal francese Sarkozy e sottoscritto dai russi – prevede il mantenimento delle “forze di pace russe” in Sud Ossezia, con il diritto di prendere persino “misure aggiuntive di sicurezza” nel perimetro di 10 km. all’interno del territorio georgiano (secondo il giornale russo Kommersant).
o Il ministro Esteri Lavrov: le forze russe rimarranno in Georgia “per tutto il tempo necessario”, e si ritireranno in concomitanza con la creazione di un contingente di pace, previsto dall’accordo.
● L’informazione è stata confermata da una lettera di Sarkozy al presidente georgiano.
● Londra e Washington hanno chiesto invece alla Russia di ritirarsi al più presto dalla Georgia.
● L’accordo di tregua concluso sotto l’egida di Sarkozy è alle condizioni di Mosca,
● non riconosce l’integrità territoriale della Georgia, abbandona ulteriormente ai russi Abhkazia ed Sud Ossezia; non condanna l’aggressione russa;
● riconosce alla Russia il diritto di difendere gli interessi dei russofoni all’estero.
o Il presidente lituano, Adamkus, lo paragona addirittura a quelli di Monaco del 1938, quando GB e Francia hanno consentito ad Hitler di annettere Sudeti e Cecoslovacchia, per proteggere i germanofoni.
o A ciò si aggiungono errori madornali come aver dimenticato di farlo firmarte dalle parti, o aver lascito flagranti zone d’ombra.
– Sarkozy sperava di dimostrare che l’Europa poteva essere ai posti di manovra in un conflitto importante, gli americani erano fuori dal gioco, per la prima volta sembravano paralizzati, mentre gli europei erano pronti ad agire.
o Quello di Sarkozy e del ministro Esteri Kouchner è stato un attivismo inedito in Europa, una prova di velocità verso Tbilisi e Mosca, senza chiedere agli europei alcun mandato negoziale;
o se la Francia avesse seguito le regole con la convocazione dei ministri Esteri UE, la mediazione avrebbe fallito.
o La UE non è in posizione di fare lezioni, visti i precedenti del Kosovo;
o il presidente georgiano, Saakashvili, si è da solo messo in trappola bombardando per primo nottetempo dei civili in Sud Ossezia.
– Aspetti politici positivi: gli europei si sono mossi per la prima volta senza attendere il via dalla Nato.
– Secondo l’eurodeputato, il verde Cohn Bendit gli europei non riusciranno alla lunga a mascherare le loro divergenze, e i russi ne approfittano.
● Una prima breccia si è aperta con l’accordo tra Polonia e Usa per uno scudo antimissilistico da istallare in Polonia.
● Occorre abbandonare la strategia dello scontro perseguita dall’Amministrazione Bush, pericolosa soprattutto se si dispone di scarsi mezzi di pressione:
o il ministro Esteri francese, Kouchner: nessuno attaccherà militarmente la Russia e neppure potrà tagliare il flusso di gas verso la Russia;
– L’efficacia dell’iniziativa di Sarkozy dipende ormai dalla buona volontà russa: Mosca dovrebbe accettare:
o il piano di pace tramite una risoluzione ONU che riconosca però l’integrità del territorio georgiano;
o invio osservatori OCSE ;
o inizio ritiro delle sue truppe dalla Georgia.
– Sarkozy: trattare anzitutto la Russia come grande potenza.
+ Georgia: successo tattico, ma conseguenze strategiche
● Con il suo bombardamento a sorpresa di una città Saakashvili è caduto nella trappola: i russi aspettavano solo questo errore, che ha dato loro un pretesto per mettere in atto le loro mire imperialiste.
● Gli USA si sono irrigiditi, di fronte al rischio che Mosca approfitti delle divergenze USA-UE.
● La UE, con fratture profonde tra paesi della vecchia e nuova Europa, ha per la prima volta agito come tale sul piano int.le, come non ha fatto per la guerra in Irak.
● (Vernet) Sarkozy ha ottenuto una vittoria tattica facendo da mediatore tra Russia e Georgia,
● ma il mediatore è stato trasformato in messaggero di capitolazione, con l’integrità territoriale e la sovranità della Georgia infrante.
– Gli osservatori int.li rimarranno al di là del confine e potranno accedere a Sud Ossezia ed Abkhazia colo con il consenso russo.
Quando i loro interessi sono in discussione i russi, come gli americani, non si preoccupano delle organizzazioni int.li.
LEMONDE.FR avec Reuters et AFP | 16.08.08 | 10h35 • Mis à jour le 16.08.08 | 18h05
– L’accord de cessez-le-feu entre la Russie et la Géorgie, approuvé samedi par Moscou, n’est pas lu de la même manière au Kremlin et à la Maison Blanche. Après avoir signé le texte, le président Dmitri Medvedev, ainsi que le chef de la diplomatie Sergueï Lavrov, ont assuré qu’ils appliqueraient "scrupuleusement" les engagements de l’accord.
– Mais l’un des principaux points de l’accord, le retrait des troupes russes fait polémique. Le chef de la diplomatie russe, Serguei Lavrov a precisé que les forces russes demeureront "aussi longtemps qu’il le faudra" en Géorgie et se retireront "au fur et à mesure" de la mise en place du contingent de maintien de la paix prévu par l’accord.
– Par ailleurs, il a indiqué que Moscou entamerait bientôt des consultations avec l’ONU et l’OSCE, en vue d’accroître le nombre des observateurs internationaux, y compris militaires, en Ossétie du Sud.
– Le plan de paix prévoit le retour en Russie des forces supplémentaires que Moscou avait lancées contre l’armée géorgienne. Mais le journal russe Kommersant affirmait, samedi, que le texte permettait le maintien des "forces de paix russes" en Ossétie du sud, leur accordant même le droit de prendre des "mesures additionnelles de sécurité" dans un périmètre de 10 kilomètres à l’intérieur du territoire géorgien. Une information confirmée par une lettre de Nicolas Sarkozy au président géorgien, dont l’AFP à eu connaissance.
DES PATROUILLES RUSSES SUR LE TERRITOIRE GÉORGIEN
– Selon ce document, les troupes russes pourront se rendre dans "une zone d’une profondeur de quelques kilomètres depuis la limite administrative entre l’Ossétie du Sud et le reste de la Géorgie, de façon à ce qu’aucune centre urbain significatif n’y soit inclus – je pense en particulier à la ville de Gori -", dit ce document signé par M. Sarkozy et daté du 14 août. Ces mesures "prendront la forme de patrouilles effectuées par les seules forces de maintien de la paix russes aux niveaux autorisées par les arrangements existants, les autres forces russes se retirant sur leur positons antérieures" aux hostilités.
– A l’inverse, Londres et Washington ont appelé la Russie à se retirer de Géorgie au plus vite. "Maintenant, il faut que la Russie honore l’accord et retire ses troupes", a déclaré le président américain George Bush, estimant que l’accord était "une source d’espoir". Mais il a également réaffirmé que les territoires d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud devaient continuer à faire partie de la Géorgie. "Il n’y a aucune discussion possible sur le sujet", a-t-il ajouté. Condoleezza Rice a haussé le ton, estimant que les forces russes devaient "commencer à se retirer rapidement" de Géorgie.
Sur le terrain, samedi, la situation restait confuse, même si les troupes russes restaient solidement ancrées en territoire géorgien. La route reliant Tbilissi à Gori, où les forces russes avaient pris position, était ouverte à la circulation, mais quelques soldats russes creusaient des tranchées aux abords de cette voie près d’Igoïeti. De nombreux mouvements de chars et de véhicules blindés d’infanterie ont même été observés par un journaliste de l’AFP près de cette ville, à environ 30 km de Tbilissi. Selon Tbilissi, il n’y a aucun signe d’un départ des troupes russes. "Les Russes restent. Ils n’ont pas du tout l’intention de partir", a déclaré Chota Outiachvili, porte-parole du ministère des affaires étrangères géorgien.
Selon l’ambassadeur de France en Géorgie, Eric Fournier, la situation humanitaire à Gori, où il a pu se rendre, est "absolument dramatique". "Le gouverneur de Gori appelle à l’aide. L’aide humanitaire arrive au compte-gouttes, des femmes, des enfants n’ont rien à manger", a-t-il ajouté.
LE MONDE | 16.08.08 | 13h37
– En négociant mardi 12 août, au nom de l’Union[e] européenne, un cessez-le-feu avec le président russe Dmitri Medvedev et le premier ministre Vladimir Poutine puis le président géorgien Mikheïl Saakachvili, Nicolas Sarkozy espérait montrer que l’Europe pouvait être à la manoeuvre dans un conflit d’une importance majeure. Les Américains étaient hors jeu : impossible pour d’eux d’aller au-delà des rodomontades verbales dans une guerre qui implique directement Moscou. Pour la première fois, Washington semblait paralysé et les Européens tournés vers l’action.
– Afin de s’engouffrer dans la brèche, M. Sarkozy, qui exerce la présidence semestrielle de l’UE, a fait preuve d’un activisme inédit en Europe. Avec son ministre des affaires étrangères, Bernard Kouchner, il a pris de vitesse ses partenaires européens en courant à Tbilissi et à Moscou, sans solliciter d’eux le moindre mandat de négociation, même s’il leur téléphonait sans cesse. Il les a mis ensuite devant le fait accompli, leur demandant de valider l’accord.
– En creux, l’affaire montre l’inadaptation d’un système européen en panne de leadership, qui ne peut agir que lorsque sa présidence semestrielle est exercée par un dirigeant qui prend le dossier en main et bouscule les règles communes.
– La médiation aurait, en effet, sans doute échoué si les Français avaient travaillé dans les règles de l’art, convoquant d’abord une réunion[e] de leurs ministres des affaires étrangères, comme cela avait été initialement envisagé. La rédaction d’un mandat précis, rappelant les principes de base du droit international, aurait empêché un accord avec les Russes.
– Car, c’est le problème essentiel, l’accord conclu sous l’égide de M. Sarkozy s’est conclu aux conditions de Moscou.
– Le président lituanien, Valdas Adamkus, est allé jusqu’à comparer l’accord à ceux de Munich, lorsque les Britanniques et les Français avaient laissé en 1938 Hitler annexer les Sudètes en Tchécoslovaquie, arguant de la nécessité de protéger les populations Germanophones.
– En ne reconnaissant pas l’intégrité du territoire géorgien, l’accord abandonne un peu plus l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud, sécessionnistes de la Géorgie, aux Russes. Il foule aux pieds les principes européens, en ne condamnant pas l’agression militaire russe en Géorgie.
– S’y ajoutent des erreurs grossières, comme l’oubli de faire signer l’accord par les parties prenantes ou le fait d’avoir laissé des zones d’ombres flagrantes.
– Certes, il était difficile, voire impossible, de faire mieux dans un premier temps, dans des négociations d’homme à homme et tant le dossier des Géorgiens est mal emmanché. Les Européens sont mal placés pour dénier aux Abkhazes et aux Ossètes le droit à s’autodéterminer, eux qui ont organisé l’indépendance du Kosovo. Surtout, le président Saakachvili s’est piégé lui-même en bombardant, en premier et de nuit, des civils en Ossétie du Sud.
C’est pourquoi l’accord signé sous l’égide des Français, bien que favorable aux Russes, a été approuvé le lendemain par les 27 à Bruxelles, nul n’ayant osé torpiller un texte qui amorçait timidement un cessez-le-feu.
– Le ministre allemand des affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier, grand défenseur de la Russie, a veillé à prendre la parole dans les derniers pour ne pas braquer ses homologues anti-russes. La commission des affaires étrangères du Parlement européen ne s’est pas réunie, pour cause de vacances et afin de ne pas gêner les capitales.
– Mais, pour la première fois, les Européens ont débattu sans qu’une réunion[e] au siège de l’OTAN, à quelques kilomètres de là, ait donné le la.
– Les anciens pays communistes étaient perturbés de cette émancipation, mais n’ont pas mis de veto. M. Sarkozy a sans doute récolté les fruits de son travail de réconciliation avec les pays de l’élargissement, les plus hostiles à Moscou. Depuis un an, le président français bichonne ces pays, qui s’étaient sentis humiliés par Jacques Chirac lorsque celui-ci les avait accusés d’avoir perdu "une bonne occasion de se taire" en soutenant George Bush en Irak. Avec sa décision de réintégrer le commandement militaire de l’OTAN, Paris n’est plus systématiquement soupçonné d’antiaméricanisme, "ce cancer culturel qui empêche la France de déployer sa diplomatie", selon l’expression de M. Sarkozy.
– Pour l’eurodéputé Vert Daniel Cohn-Bendit. "Les Français, comme d’habitude, ont voulu jouer trop malin. A court terme, ils ont limité la casse, à long terme, ils n’ont pas renforcé l’Europe." Selon lui, les Européens ne parviendront pas à masquer longtemps des divergences dont personne n’est dupe, à commencer par les Russes, qui en profitent.
– Le président français a déjà gaspillé une partie de son crédit politique en reconnaissant à la Russie le droit de défendre les intérêts des Russophones à l’étranger.
– Une première brèche s’est ouverte, jeudi 14 août, lorsque Varsovie a signé un accord avec Washington pour installer un bouclier antimissile en Pologne.
Or c’est là que se pose la question décisive : faut-il rompre avec la stratégie d’affrontement et de refoulement poursuivie par l’administration Bush, et dont la Géorgie était une pièce maîtresse ? Cette stratégie est dangereuse, surtout lorsqu’on a peu de moyens de pression. Bernard Kouchner rappelait pendant sa médiation une évidence : nul ne va attaquer militairement la Russie, ni couper le gaz à l’envers. M. Sarkozy estime qu’une première solution consiste à traiter Moscou avec les égards dus à une grande puissance, alors qu’elle s’est sentie humiliée dans les années 1990. Il pense que sa relation parfois rugueuse avec M. Poutine, mais franche, peut contribuer à faire évoluer le premier ministre russe.
La pertinence, a posteriori, de l’initiative de M. Sarkozy dépend désormais du bon vouloir russe. Pour démontrer qu’il parvient à faire bouger les lignes, Paris a besoin que Moscou accepte enfin le plan de paix à travers une résolution à l’ONU qui reconnaisse cette fois l’intégrité du territoire géorgien, que la Russie dise oui à l’envoi sur le terrain d’observateurs mandatés par l’Organisation de sécurité et de coopération en Europe (OSCE) et qu’elle commence à retirer des troupes russes de Géorgie. Les Américains poussent eux aussi dans ce sens, avec la visite, vendredi, de la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice à Tbilissi. Mais si Moscou ne s’exécute pas, Washington pourrait vouloir reprendre la main dès la réunion[e] des ministres des affaires étrangères de l’OTAN, mardi 19 août. Ralliant les pays de l’élargissement, les Américains redonneraient au conflit un goût classique de guerre froide et scelleraient l’échec d’une tentative d’émancipation européenne.
Article paru dans l’édition du 17.08.08
Le Monde 080816
LE MONDE | 15.08.08 | 13h29
La crise géorgienne est en passe de se transformer en un affrontement diplomatique russo-américain. Tandis que la Russie, en dépit de l’accord qu’elle est supposée avoir accepté, pousse son avantage en progressant à l’intérieur du territoire géorgien, loin des limites de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, Washington, après le flottement des premiers jours, ne cesse de hausser le ton.
– En bombardant le premier, par surprise, une ville et ses civils, le président géorgien Mikheil Saakachvili est tombé dans un piège. Il a donné aux Russes, qui n’attendaient apparemment que cette erreur, un prétexte à mettre en oeuvre ce qu’il faut bien appeler des visées impérialistes. Moscou invoque la défense de citoyens russes hors de ses frontières (la majorité des Abkhazes et Ossètes du Sud ont des passeports russes).
– Dès lors, une partie des Européens, notamment dans les anciens satellites soviétiques, peuvent se demander si le même argument ne sera pas un jour brandi pour la défense des Russes des Etats baltes ou ceux de Crimée, en Ukraine.
– Mais, de son côté, M. Saakachvili a déclenché un engrenage qui le dépasse désormais, et il multiplie des déclarations qui enveniment la situation. Ainsi, face aux pressions de leur allié géorgien, les Américains se raidissent, quitte à ce que Moscou profite des divergences qui apparaissent entre Washington et l’UE.
– Pour sa part, l’Union[e], sous la présidence de Nicolas Sarkozy, a choisi une option positive mais risquée, sur un terrain où elle était, de fait, mieux placée que les Etats-Unis pour, au moins, stopper la guerre. Elle a pu encourir le reproche de ménager Moscou, prix à payer pour parvenir à un accord de cessez-le-feu. Mais, pour la première fois dans une telle crise, l’UE a agi en tant que telle sur le plan international, ce qu’elle avait été incapable de faire au moment de l’Irak.
– Même si les fractures sont profondes et évidentes entre pays de l’"ancienne" et de la "nouvelle" Europe. Au-delà de la seule violation de la souveraineté et du territoire d’un Etat indépendant, la brutalité de la Russie ne peut pas être admise par la communauté internationale. Le pire serait que Moscou retire de cette crise un sentiment d’impunité. C’est un défi à la fois pour les diplomaties européenne et américaine.
Article paru dans l’édition du 16.08.08
Chronique – Géorgie : succès tactique, mais conséquences stratégiques,
par Daniel Vernet
LE MONDE | 19.08.08 | 13h13 • Mis à jour le 19.08.08 | 13h13
Sans aucun doute, Nicolas Sarkozy a remporté un succès tactique en se faisant, au nom de l’Union[e] européenne, l’honnête courtier du cessez-le-feu entre la Russie et la Géorgie. La première priorité, a dit le président de la République, était de mettre fin aux combats. C’est fait.
– Ce succès n’en laisse pas moins un goût amer, tant il est vrai que le plus fort a été en mesure d’imposer sa loi, transformant le médiateur en messager de la capitulation. Il y a fort à craindre que "l’intégrité territoriale de la Géorgie", invoquée par les Occidentaux, ne soit plus qu’un souvenir car, selon toute vraisemblance, Moscou opposera son veto à toute résolution de l’ONU qui en ferait état. La "souveraineté" de la Géorgie, que la Russie affirme reconnaître, sera elle aussi bien entamée par le droit que se sont octroyé les Russes de patrouiller à l’intérieur de la Géorgie en dehors des territoires disputés.
– Quant aux observateurs internationaux, dont un petit nombre étaient déjà présents dans les régions séparatistes et dont l’inefficacité a été une fois de plus démontrée, ils n’iront en Ossétie du Sud et en Abkhazie que si les Russes les y autorisent. C’est-à-dire qu’ils resteront de l’autre côté de la frontière.
Le président Dmitri Medvedev ne l’a pas caché : les Ossètes et les Abkhazes ne font confiance qu’aux Russes pour leur sécurité. En clair, les forces internationales ne sont pas les bienvenues dans la zone d’influence que Moscou est en train de se reconstituer dans le Caucase. C’est la première conséquence stratégique de la guerre. Le Kremlin est revenu à une vieille pratique. Il veut être maître dans son "étranger proche" et partie prenante de l’ordre régnant en dehors de sa zone. Une idée qui rappelle ce que Nikita Khrouchtchev disait à John Kennedy lors de leur première rencontre en 1961 à Vienne : ce qui est à nous est à nous, ce qui est à vous est négociable.
– Un autre enseignement stratégique est que les Russes se soucient peu des organisations internationales quand leurs intérêts immédiats sont en jeu. Ils ne sont évidemment pas les seuls, et les Américains leur ont montré le mauvais exemple en Irak. Eux aussi veulent être producteurs de normes internationales. Contrairement aux Occidentaux, toutefois, ils ne se posent pas de questions sur la légitimité de leurs interventions. Les notions de "proportionnalité" des moyens et d’emploi de la force en dernier recours (saint Augustin), qui alimentent chez nous d’interminables débats, leur sont parfaitement étrangères. Les Tchétchènes en ont fait la douloureuse expérience.
Invoquant, à tort, le précédent du Kosovo pour justifier le dépeçage de la Géorgie, Moscou semble abandonner la doctrine sacro-sainte de la souveraineté des Etats-nations et de l’intangibilité des frontières, qui était le fondement traditionnel de sa politique étrangère. Un abandon à double tranchant pour une Fédération de Russie qui reste une mosaïque de peuples.
Le Kremlin a enfin placé les Occidentaux devant un dilemme qu’ils risquent de résoudre en ordre dispersé : ou bien ils se montrent solidaires des Etats qui veulent s’émanciper de sa tutelle, et ils s’exposent à des représailles, énergétiques par exemple ; ou bien ils les laissent tomber, manifestant ainsi l’inanité de leurs engagements et invitant Moscou à chercher de nouvelles revanches.
Pour les Européens, la voie est étroite. Mais même les plus enclins à trouver des excuses à la Russie devraient partager deux conclusions : la nouvelle agressivité de la politique étrangère russe est inséparable de l’autoritarisme du système Poutine. Si la Russie est plus que jamais une puissance avec laquelle on doit compter, on ne peut plus nourrir d’illusions sur la vraie nature de son régime.
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Article paru dans l’édition du 20.08.08