Difesa europea : Parigi vuole l’appoggio di Londra/Difesa : la nuova situazione

Le Figaro       080327

Difesa europea : Parigi vuole l’appoggio di Londra

Arnaud de La Grange

+ Sarkozy rilancia la cooperazione con Londra

Alain Barluet
Tesi :

●    La Francia vuole coinvolgere la GB nel suo grande gioco su NATO e Difesa europea; sa che non potrebbe far nulla senza il consenso dell’altra vera potenza militare europea;

o   rilanciare lo “spirito di Saint Malo”, il vertice franco-britannico del 1998 che ha messo le basi della difesa europea, a direzione franco-britannica.

o   Sarkozy ha promesso di associare la GB alla presidenza francese della UE.

●    La scommessa francese punta ad ammansire USA e GB, che hanno sempre frenato sulla Difesa europea; di qui una serie di iniziative di Sarkozy:

o   prospettiva di reintegro nella struttura militare integrata della Nato;

o   annuncio di rafforzamento francese in Afghanistan, e partecipazione diretta alla guerra contro i talebani nell’Est e Sud.

– Francia e GB si sono impegnate a cooperare per rafforzare le capacità miltari europee nella UE e nella Nato, su una serie di progetti

– Una Difesa UE deve essere in grado di operare in modo autonomo, deve perciò avere un suo stato maggiore; a questo si sono sempre opposti i britannici (sarebbe un duplicato del QG Nato di Mons, Belgio).

●    Oggi la GB è più aperta alla possibilità di un nuovo QG UE operativo a Bruxelles, per coordinare le capacità civili UE con quelle militari Nato;

o   ma il mutamento di posizione da parte britannica dipende dal cambiamento della posizione USA: il “Tutto Nato” porta gli europei ad appoggiarsi su essa economizzando sul bilancio per la difesa.

– Francia e GB coopereranno su ricerca e sviluppo, con €50mn. ognuna; Francia e GB rappresentano già finanziariamente il 70% del settore nella UE.

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Le Figaro       080401
Difesa : la nuova situazione

– Dibattito in Francia sulla politica di difesa di Sarkozy, a sinistra e tra la destra “sovranista”:

●    combattere nell’Hindukush è fare il gioco degli USA, rompendo con il particolarismo francese voluto da De Gaulle, e rispettato finora, che ha permesso alla Francia di evitare la seconda guerra d’Irak.

●    Per Sarkozy sono mutati i dati di fatto: obiettivo costruire la difesa europea, non realizzabile senza il consenso britannico ed americano; ci vogliono alcuni aggiustamenti tattici, tra cui il reintegro nella struttura militare Nato, che ha un valore soprattutto simbolico, scarso nei fatti.

●    Il dialogo con il Pentagono è possibile solo in presenza di una difesa europea e se la Francia è nel comando Nato.

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Le Figaro       080324/28
Missione Rafale nei cieli di Kandahar
Katia Clarens

●    La Francia sta per inviare 1000 soldati aggiuntivi in Afghanistan, nel Sud, i 6 caccia francesi appoggiano già le forze della coalizione.

●    L’impegno aggiuntivo francese dovrà però essere accompagnato da una ridefinizione della strategia degli alleati in Afghanistan.

o   Il battaglione francese è nella base di Warehouse, Kaboul. Gli effettivi francesi passerebbero a 2500 dagli attuali 1500, di cui 1000 a Kabul, 220 OMLT (Operationnal Mentoring Liaison Team, integrati nelle unità afghane) nell’Est e 2000 attorno agli aerei di Kandahar.

●    L’opzione preferita per il nuovo battaglione è l’Est,

o   per motivi tattici (potrebbe operare in collegamento con le altre squadre OMLT delle province di Wardak, Logar e Kapisa;

o   strategici, l’area di attività francese formerebbe una specie di cintura di sicurezza dall’East fino a Kabul;

o   logistica, la base di Kabul è più vicina.

– la scelta del Sud sarebbe dettata da motivazioni più politiche, per le pressioni nella Nato di canadesi e olandesi.

●    I 3 Mirage 2000D e 3 Rafale sono costruiti dall’industriale Serge Dassault, presidente del gruppo Figaro.

o   Per il bombardamento Mirage e Rafale devono agire assieme: il Mirage è dotato di un pod laser che illumina l’obiettivo per le bombe GBU-12 (250kg) dotate di un sistema di guida laser.

o   Nelle prime settimane di marzo 5 GBU-12 hanno colpito le posizioni nemiche.

La base di Kandahar, sotto comando Usa, è tra le maggiori del mondo: 25 km2, con 11 000 militari di 15 nazioni, tra questi un distaccamento dell’aeronautica francese con 170 soldati.

Le Figaro        080327
Défense européenne : Paris veut l’appui de Londres
Arnaud de La Grange

27/03/2008 | Mise à jour : 21:30 | Commentaires 3

Comme Washington, les Britanniques seraient prêts à accepter que l’Union européenne se dote d’un quartier général opérationnel.

–   La France veut entraîner Londres dans son grand jeu autour de l’Otan et de la défense européenne. Sans l’accord de l’autre vraie puissance militaire européenne, Paris sait que rien ne sera possible. Il faut donc relancer l’«esprit de Saint-Malo», celui du sommet franco-britannique fondateur de la défense européenne en 1998.

Le pari français consiste à cesser de jouer les mauvais garçons de l’Alliance atlantique, dans le but d’amadouer les pays qui freinent traditionnellement sur la défense européenne États-Unis et Grande-Bretagne en tête.

–   D’où une série de gestes : la perspective d’une possible réintégration dans la structure militaire intégrée de l’Otan en est un ;

–   l’annonce de renforts français en Afghanistan, et surtout d’une plongée dans la vraie guerre contre les talibans, dans l’est ou le sud du pays, en est un autre.

–   Ceci posé, reste le grand marchandage défense européenne-Otan. L’Europe de la défense n’existera que lorsqu’elle aura les capacités de planifier et de mener une opération de manière autonome.

Risques de duplication

–   Cela suppose qu’elle soit dotée d’un état-major digne de ce nom. Les Britanniques ont toujours refusé cette perspective, en invoquant un risque de «duplication» inutile avec les moyens de l’Otan, notamment le Shape, le grand QG de l’Alliance établi près de Mons en Belgique. Ils ont fait valoir que l’UE pouvait utiliser ces mêmes moyens de l’Otan, dans le cadre des accords dits de «Berlin +», pour certaines opérations.

–   Les Britanniques semblent aujourd’hui mieux disposés à accepter l’idée de doter l’UE d’un nouveau «QG opérationnel» à Bruxelles. «Mais ils souhaiteraient que cette nouvelle structure ait vocation à coordonner les capacités civiles de l’UE et militaires de l’Otan, explique une source diplomatique, c’est bien, mais il faut faire attention à ce que cet argument technique ne vide pas l’initiative de sa portée politique.»

–   Si les lignes bougent à Londres, c’est aussi parce qu’elles changent à Washington. À la fin du mois de février, l’ambassadeur des États-Unis auprès de l’Otan a fait un discours remarqué à Paris puis à Londres. Victoria Nuland reconnaissait que l’Europe devait pouvoir «agir de manière indépendante» et, tout en restant vague, elle admettait qu’une enceinte propre dédiée à la planification et à l’entraînement était un besoin légitime.

À Washington, on estime que la défense européenne n’est plus le navire à torpiller à tous coups. Le «tout Otan» conduit en effet les Européens à se reposer sur cette assurance-vie et à économiser sur leurs budgets de défense, ce qui pose problème quand il faut se trouver des alliés sérieux.

–   Toujours pour mettre Londres dans de bonnes grâces, Paris envisagerait de ne demander que progressivement des postes de responsabilité au sein de l’Otan. Le poste de saceur adjoint (numéro deux des forces alliées en Europe) est ainsi toujours dévolu aux Britanniques. Et ceux-ci restent très attachés à leur statut, de facto, de premier lieutenant de l’Amérique au sein de l’Otan.

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Le Figaro        080327
Sarkozy relance la coopération avec Londres

De l’un de nos envoyés spéciaux à Londres Alain Barluet

27/03/2008 | Mise à jour : 21:34 | Commentaires 21

–   Nicolas Sarkozy et Gordon Brown jeudi à Londres. En plus des grands dossiers évoqués par les deux hommes, Paris a promis d’«associer» Londres à la présidence française de l’UE et annoncé une intensification des rencontres à haut niveau.

–   Le chef de l’État et le premier ministre britannique ont décidé de serrer les rangs, notamment dans le domaine de la défense, pour affronter les défis globaux.

Très en phase, Nicolas Sarkozy et Gordon Brown n’ont pas boudé les superlatifs pour qualifier le sommet qu’ils ont tenu jeudi, au second et dernier jour d’une visite d’État dominée par les fastes royaux et le charme de la nouvelle première dame. Une «visite historique», a estimé le premier ministre britannique, une «coopération exemplaire» lui a fait écho, avec chaleur, le président français. Leur conférence de presse commune s’est tenue à un jet de ballon des tribunes du stade d’Arsenal. Quelques minutes plus tôt, les deux hommes, l’un et l’autre grands amateurs de football, ont visité les installations sportives de la plus française des équipes britanniques, en compagnie de l’entraîneur Arsène Wenger.

–   Sur le terrain politique, le rendez-vous franco-britannique a abouti à une longue liste de grands dossiers, du climat à l’immigration, du développement aux réformes des institutions internationales, de la transparence financière à l’éducation, sur lesquels Nicolas Sarkozy et Gordon Brown ont promis d’approfondir leurs relations. La défense figurait en bonne place de l’agenda.

–   La France et l’Angleterre ont décidé de «donner un nouvel élan à (leur) coopération bilatérale en matière de défense industrielle». Les deux partenaires sont notamment convenus d’apporter chacun 50 millions d’euros pour intensifier leur effort commun en matière de recherche et développement. Un domaine où les deux pays représentent déjà, en termes financiers, 70 % des initiatives européennes.

–   Ils se sont également engagés à «coopérer au renforcement des capacités militaires européennes dont disposent l’Union européenne et l’Otan», sur une série de projets (l’avion de transport militaire A400M, le déploiement des hélicoptères…).

Accord de principe

Le communiqué officiel évoque une intention partagée «d’œuvrer à la modernisation de l’Otan» et au «renforcement de l’interaction et de la coopération UE-Otan». Sur ce dossier, jugé prioritaire par Nicolas Sarkozy, mais examiné avec prudence par Londres, très sourcilleux sur le rôle de l’Alliance, le chef de l’État n’a manifestement obtenu qu’un accord de principe. D’autres négociations sont à venir, les annonces étant réservées pour le sommet de l’Otan à Bucarest, la semaine prochaine.

–   Sur l’Afghanistan, Nicolas Sarkozy a été salué par son hôte pour son intention, réaffirmée, d’envoyer des troupes supplémentaires, même s’il n’a pas confirmé publiquement le chiffre de 1 000 hommes cité lundi dernier dans Le Figaro. «L’Afghanistan constitue un défi stratégique. (…) Nous sommes déterminés à rester avec nos Alliés aussi longtemps que nécessaire pour assurer la stabilité de ce pays», souligne la déclaration finale.

–   Devant les journalistes, le président de la République s’en est pris vigoureusement à ceux qui, en France, dénoncent son initiative afghane. Il s’est déclaré favorable «sans aucune réserve» au débat sur le sujet devant le Parlement, mardi prochain. «J’ai dit mercredi (devant le parlement britannique, NDLR) que je ne souhaitais pas le retour des talibans en Afghanistan, j’espère que les élus de l’opposition partagent cette opinion (…) J’ai dit mercredi qu’un message d’échec serait un message désastreux, j’espère que les dirigeants de l’opposition partagent cette opinion.»

Autre sujet d’«accord complet», selon Nicolas Sarkozy, l’immigration. Paris peut se féliciter d’avoir obtenu formellement l’accord des Britanniques pour l’adoption du nouveau pacte sur l’immigration que défendra le président de la République durant la prochaine présidence française de l’Union.

Désaccord sur le Tibet

En revanche, la situation au Tibet, évoquée lors du sommet, s’est soldée par un certain décalage. Gordon Brown, à la tête du pays qui organisera les Jeux de Londres en 2012, a répété qu’il écartait la possibilité d’un boycott. Nicolas Sarkozy a laissé pour sa part ouverte la possibilité de bouder le coup d’envoi des JO, comme il l’avait déclaré en début de semaine à Tarbes. «Il faut que je consulte les autres sur leurs positions pour savoir si j’irai à la cérémonie d’ouverture ou pas», a déclaré le chef de l’État, qui présidera l’UE à partir de juillet. «En fonction de la situation au Tibet, je me réserverai le droit de dire si je vais ou non à la cérémonie d’ouverture», a-t-il ajouté.

–   Peu d’annonces véritablement inédites donc, jeudi à Londres, hormis peut-être le projet du plan «Afrique 2010», pour la scolarisation de 16 millions d’enfants du continent. L’essentiel était surtout dans l’atmosphère empathique de la rencontre. Les deux dirigeants ont affirmé s’être rencontrés sur la perspective d’une «Europe mondiale», sorte de synthèse entre les aspirations britanniques à une union[e] «ouverte» et le souci continental de promouvoir d’abord la réciprocité et les intérêts particuliers des Vingt-Sept. Très enthousiaste, Nicolas Sarkozy a promis d’«associer» Londres à la présidence française de l’UE et annoncé une intensification des rencontres à haut niveau. «Nous devons collaborer avec ceux qui nous ressemblent», a-t-il déclaré, ajoutant que cela ne «rendait pas moins grande l’importance de l’axe franco-allemand». Outre-Rhin, de tout de même, certains apprécieront.

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Le Figaro        080401
Défense : la nouvelle donne
 

01/04/2008 | Mise à jour : 07:35 | Commentaires 12

L’éditorial d’Yves Thréard du 1er avril.

Des centaines de soldats français devraient bientôt prendre le chemin de l’Afghanistan. Décision lourde du chef de l’État, dont on peut comprendre qu’elle suscite un débat parlementaire. Il est justifié que beaucoup d’élus l’exigent, notamment dans l’opposition, alors que la Constitution ne le prévoit pas. La vie de ces militaires sera exposée puisqu’ils seront au contact direct des forces talibanes, et non dans une traditionnelle mission d’assistance.

–   La révision annoncée de nos institutions devrait, heureusement, mettre fin à cette anomalie. Le président de la République restera, bien sûr, le chef des armées. Mais, selon le projet du comité Balladur, le gouvernement devra informer le Parlement de toute intervention extérieure. Et un vote interviendra si celle-ci excède six mois. La démocratie s’en trouvera grandie.

–   Pour autant, la controverse actuelle dépasse largement ce seul problème de procédure. C’est la politique de défense de Nicolas Sarkozy qui est la cible de nombreuses critiques.

–   À gauche et quelques-uns à droite, parmi les souverainistes et dans le sillage de Dominique de Villepin, lui intentent un procès en «atlantisme». Aller au combat sur les contreforts de l’Hindu Kush, c’est faire le jeu des États-Unis. C’est rompre avec la voix singulière de la France, portée par le général de Gaulle et que ses successeurs ont respectée à la lettre. Cette attitude nous a, il est vrai, évité la deuxième guerre d’Irak. Le récent rapport sur la politique étrangère, commandé par le chef de l’État à Hubert Védrine, préconisait de ne pas trop s’en éloigner.

–   Dans l’esprit de Nicolas Sarkozy, la donne a changé. Il fait de la construction d’une défense européenne, ambition longtemps contrariée, un objectif. Et l’on sent bien qu’il veut mettre à profit sa présidence de l’Union, à partir du 1er juillet, pour avancer.

●    Beau et nécessaire projet si l’on veut que l’Europe pèse, un jour, sur les affaires du monde. Mais qui passe aussi par quelques réajustements tactiques. Rien ne peut être réalisé dans ce domaine sans les Anglais et, donc, leurs alliés naturels, les Américains.

–   D’où l’idée que la France reprenne une place au sein de la structure militaire intégrée de l’Otan. Décision qui tient surtout du symbole, car, dans les faits, elle ne changerait pas grand-chose. Le dossier sera au cœur du sommet de l’Alliance atlantique qui s’ouvre demain à Bucarest.

Si l’Europe ne veut pas rester une simple filiale des États-Unis, la raison lui commande de s’organiser. Mais elle n’y parviendra pas en s’opposant avec les vieux réflexes d’antiaméricanisme qui subsistent ici ou là, notamment sur les rives de la Seine. La négociation passe par l’association.

Faute d’une défense européenne et d’une présence dans le commandement intégré de l’Otan, il paraît difficile de dialoguer avec le Pentagone. Un allié précieux, dont l’engagement hasardeux en Mésopotamie ne doit pas faire oublier toutes les valeurs que nous partageons avec lui.

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Le Figaro        080328
Mission Rafale dans le ciel de Kandahar
Katia Clarens

28/03/2008 | Mise à jour : 14:58 |

–   Alors que la France s’apprête à envoyer un millier d’hommes supplémentaires en Afghanistan, les chasseurs basés au sud du pays appuient déjà les forces de la coalition lors des combats qui les opposent aux talibans.

Ils viennent de décoller. Un Mirage 2000D d’abord, et maintenant un Rafale, volant à cinq mètres du sol au long de la piste pour ne pas s’exposer aux tirs ennemis, puis se dégageant soudain à la verticale, sous 15 tonnes de poussée, pour n’être plus qu’un point minuscule, un bruit de réacteurs flottant dans l’air brûlant, jusqu’à disparaître.

Sud de l’Afghanistan, 11 heures du matin. Le soleil harcèle le désert argileux sur lequel s’étire, gigantesque, la base militaire de Kandahar : une hydre guerrière veinée de milliers de câbles et crachant une poussière asphyxiante qui a tout recouvert, livrant un monde en gris. Au sol, les pas s’impriment, identiques à ceux de l’homme sur la Lune, bientôt effacés par le passage d’une procession de blindés.

–   Installée dans l’ancien fief taliban, cette base sous commandement américain, cible privilégiée des islamistes, compte parmi les plus grandes au monde. Près de 25 kilomètres carrés peuplés de 11 000 militaires de 15 nationalités. Dont un détachement français de l’armée de l’air de 170 hommes et femmes.

–   Leur mission : permettre aux six avions de chasse français – trois Mirage 2000D et trois Rafale monoplaces fabriqués par l’industriel Serge Dassault, président du Groupe Figaro – d’appuyer les troupes terrestres de la coalition (1) lors des combats contre les talibans venus du Pakistan. Mais également lors des affrontements avec les clans des chefs de guerre afghans dont les objectifs varient, allant du désir d’évacuer toute présence étrangère jusqu’au projet de renverser le gouvernement Karzaï soutenu par les Occidentaux, afin d’instaurer une dictature islamiste en Afghanistan. Un dessein appuyé par la pieuvre qaïdiste qui fomenta ici les attentats du 11 septembre 2001 et par les talibans, avec lesquels certains insurgés ont formé des alliances.

Sur la base opérationnelle qui héberge l’escadrille, le lieutenant-colonel H., commandant de la chasse et pilote de Rafale, rejoint à présent l’une des six alvéoles où stationnent les avions, saluant au passage deux des fusiliers commandos de l’air affectés à la garde des appareils. Sur sa combinaison moutarde, il porte un pantalon anti-G. Relié à l’ordinateur de bord, ce dernier pressionne les jambes pour réguler l’afflux sanguin dans les virages et pendant les accélérations, évitant ainsi les pertes de connaissance.

Dernières vérifications. Le mécanicien de piste ôte les « flammes », des goupilles de sécurité pendues aux extrémités des quatre bombes vertes de 250 kilos accrochées sous les ailes. Dans une alvéole voisine, le pilote et le navigateur du Mirage ont déjà investi la carlingue. Deux ogives pointent sous le ventre de leur avion.

–   Comme lors de chaque mission, les deux chasseurs voleront ensemble. Car le Mirage, lorsqu’il s’agit de bombarder, est indispensable au Rafale : équipé d’un pod laser qui illumine l’objectif, il permet aux bombes larguées par le Rafale – des GBU-12 dotées d’un système de guidage laser – d’atteindre précisément leur cible.

Moteurs. Sous son casque, H. n’entend presque pas le cri strident des réacteurs. Son regard est fixe, concentré. Le pilote prend possession de la machine. A l’arrière de l’appareil, la chaleur et les vapeurs de kérosène créent un univers impressionniste aux contours flous. H. échange les derniers gestes avec le mécano et sort de l’alvéole pour gagner la piste dans le sillage du Mirage. Décollage, au ras du sol encore, avant que le frelon d’acier ne se cabre, écrasant le pilote sous quatre fois son poids.

La mission d’aujourd’hui devrait durer trois heures et inclure deux ravitaillements en vol. Devrait. Car les changements sont fréquents, le binôme pouvant à tout instant être appelé pour secourir une colonne alliée en délicatesse. Contactés à la radio, les chasseurs français, s’ils sont déjà en vol, arrivent sur zone en dix minutes. En une demi-heure au maximum s’ils doivent décoller. « La plupart du temps, le seul fait d’être présents dissuade l’ennemi, explique le lieutenant-colonel H. Si cela ne suffit pas, nous faisons un passage très bas, très vite, presque à la vitesse du son pour qu’ils ne nous entendent pas arriver. Viennent ensuite les tirs de semonce au canon. Puis, en dernier recours, la destruction. »

Pour leur défense, les commandos de l’air disposent d’un arsenal

–   Au cours de la première semaine de mars, cinq GBU-12 ont ainsi frappé les positions ennemies. Consignes dominantes pour les pilotes : éviter les dommages collatéraux et les tirs fratricides. Pour s’assurer de l’absence de civils dans la zone et ne pas se tromper de cible, les aviateurs s’appuient sur leurs relais au sol : l’équipe des Tac-P (Tactical Air Control Party). Embarqués avec les combattants de la coalition et formés à l’extraction de données GPS et au guidage aérien, ils sont la clé de voûte de la défense aérienne, qui n’intervient qu’à leur demande.

–   A Kaboul, sur la base de Warehouse, où est regroupé le bataillon français (voir encadré), les hommes du capitaine G., issus du commando parachutiste de l’air n° 20 de Villacoublay, constituent l’unité Tac-P tricolore. Deux équipes de six personnes, chacune comprenant un contrôleur aérien avancé – le capitaine G. -, un adjoint au chef d’équipe, chargé d’assurer la sécurité du groupe, un radio transmetteur, un opérateur manoeuvrant le désignateur laser, invisible à l’oeil, qui pointera la cible en cas de besoin, un homme chargé de l’extraction de données GPS et un tireur d’élite. « Il est important que les gars au sol imaginent ce que voit le pilote, explique G. C’est le fruit d’un entraînement commun. »

En cas d’attaque, le véhicule de l’avant blindé (VAB), dans lequel ils se trouvent, se séparera de la troupe. Pour assurer leur défense, les commandos disposent d’un arsenal : deux mitrailleuses de longue portée dotées de pointeurs lasers, deux Famas équipés d’un lance-grenades de 40 mm, deux Famas valorisés désignant leur cible d’une lumière rouge. Par-dessus leurs gilets pare-balles, ils se sont harnachés de toutes les munitions nécessaires. Leur carapace pèse plus de 20 kilos.

Dans les redoutables montagnes afghanes, G. et ses hommes tenteront de trouver une planque leur permettant d’évaluer la situation puis de contacter le quartier général par radio satellitaire. Là, on sait où se trouvent les chasseurs français, américains, britanniques et néerlandais qui constituent la force aérienne en Afghanistan. Sur une fréquence cryptée, les Tac-P guideront les avions les plus proches sur l’objectif. Peut-être s’agira-t-il du lieutenant-colonel H., qui se dirige à présent vers la base de Kandahar, ses quatre bombes fixées aux ailes. La destruction n’a pas été nécessaire aujourd’hui.

–   Il survole à présent les chaînes montagneuses de la province d’Uruzgan, voisine de celle de Kandahar, au sommet desquelles la neige s’accroche encore. Dans les vallées désertiques, de petits villages aux murs de terre se recroquevillent encore sur eux-mêmes après le rude hiver. Là vivent des hommes et des femmes robustes et souvent pauvres, qui affrontent les frimas sans électricité. Des gens chahutés par les guerres successives : celle contre les Soviétiques d’abord (2), et maintenant celle-ci. Dans le sud, autour de Kandahar, ce sont des cultivateurs de pavot. Ils font pousser l’opium des talibans et des seigneurs de guerre dans un pays fournissant près de 95 % de la production mondiale.

–   Un nouveau camp accueillera bientôt 2 000 GI supplémentaires

La piste est en vue. Les deux frelons se posent et regagnent leurs alvéoles. Sur le tarmac, un groupe de soldats américains répète la cérémonie de demain : l’évacuation de deux des leurs, tués par un camion piégé. Des cercueils sont disposés près d’un gros porteur, rappelant brusquement la réalité de la guerre.

Fin de journée, crépuscule rosé. Installés dans un autobus suranné, pilotes et mécaniciens regagnent leurs tentes. Les installations sont sommaires pour le détachement français, tranchant avec celles, irréprochables, des Américains, des Anglais et des Canadiens. Ils dépassent le centre d’écoute, les oreilles de l’hydre, puis commentent l’éclosion accélérée d’un nouveau camp qui accueillera dans quelques semaines 2 000 GI supplémentaires, et sur lequel stationne déjà une armada de véhicules blindés fraîchement débarquée. Prélude à de nouveaux combats. Ici, il est clair que la guerre n’a pas dit son dernier mot.

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Le Figaro        080324
La France renforce sa présence en Afghanistan
Arnaud de La Grange

24/03/2008 | Mise à jour : 08:37 | Commentaires 37

Nicolas Sarkozy a pris la décision d’envoyer un millier de soldats supplémentaires.

–   La France, c’est décidé, va réellement plonger dans la guerre afghane, aux côtés de ses alliés de l’Otan. Après avoir pesé avantages politiques et risques militaires, Nicolas Sarkozy a pris la décision d’envoyer un bataillon supplémentaire et devrait annoncer cette décision au sommet de l’Otan de Bucarest, début avril. Comme l’écrit le Times de ce week-end, il en discutera mercredi avec un allié européen très impliqué sur le théâtre afghan, le premier ministre britannique Gordon Brown, lors d’une visite d’État à Londres.

–   Quelque 1 000 soldats français vont donc prendre le chemin de l’Afghanistan dans les semaines qui viennent. «L’idée est que tout soit en place avant l’été », confie une source militaire. Avant la traditionnelle «offensive» estivale des talibans. Ces soldats français seront en majorité issus du 8e régiment parachutiste d’infanterie de marine (8e RPIMa), basé à Castres. Cette unité était en alerte et entraînée dans le cadre de la «réserve stratégique» de l’Otan, même s’il ne s’agit pas de l’activation de celle-ci mais d’une décision nationale. Le nombre de soldats français présents sur le sol afghan passerait donc à 2 500.

–   Aujourd’hui, ces effectifs sont de 1 500 hommes : un bataillon (1 000 hommes) déployé à Kaboul, 220 OMLT (des groupes de 50 instructeurs intégrés dans des unités afghanes opérationnelles) dans l’Est et 200 hommes autour des avions basés à Kandahar (3 Rafale et 3 Mirage 2000).

Où vont bivouaquer ces renforts français ? Deux options sont possibles, à l’Est et au Sud, puisque l’idée est de déployer cette fois-ci des troupes dans cette partie du pays où se mènent les plus durs combats contre les talibans et les séides d’Al-Qaida. Depuis deux ans, la France se voyait reprocher par Washington, Londres ou les autres pays «guerriers» de l’Isaf (la force de l’Otan en Afghanistan), de refuser de prendre de trop gros risques en cantonnant ses troupes autour de Kaboul. Seuls quelque 200 commandos des forces spéciales s’étaient battus dans le Sud-Est, mais ils ont été retirés du théâtre début 2007. Ils devraient d’ailleurs faire leur retour en Afghanistan, en accompagnant le déploiement du bataillon parachutiste français.

Redéfinir la stratégie des alliés

–   L’option privilégiée par les militaires français est que ces renforts prennent la direction de l’est de l’Afghanistan. Ils seraient alors placés sous le commandement régional des Américains, qui, au sein de l’Isaf, ont la responsabilité de cette région où les talibans sont très actifs. «Il y a une logique tactique, stratégique et logistique à aller dans l’Est», explique un officier, en rappelant que «la décision finale appartient à l’Élysée».

–   Tactique, parce que le nouveau bataillon français pourrait opérer en lien avec les quatre équipes d’OMLT déployées dans les provinces du Wardak, du Logar et de Kapisa.

–   Stratégique, car la zone d’activité française formerait une sorte de « ceinture de sécurité» courant de l’Est jusqu’à Kaboul, où l’autre bataillon français reste déployé. Logistique de façon évidente, car la base arrière de Kaboul est plus proche, et des flux d’approvisionnement sont déjà mis en place pour les équipes d’OMLT.

–   Si l’option «Sud» était choisie, ce serait pour des motifs plus politiques, pour répondre à de fortes pressions au sein de l’Otan. Les Canadiens, mais aussi les Néerlandais, ont exprimé le souhait d’être épaulés par des Français. Reste à savoir quel sort sera réservé au bataillon français de Kaboul, dont le mandat expire à l’été. Tout laisse penser que sa présence autour de la capitale sera prolongée.

Décidée au nom d’une nécessaire solidarité atlantique, cette décision d’engagement plus musclé en Afghanistan devra cependant s’accompagner d’une redéfinition de la stratégie des alliés en Afghanistan. À défaut, la France apparaîtra à terme comme le supplétif européen d’une guerre sans fin et sans objectifs clairs.

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